UNE MODE ÉTHIQUE, C’EST POSSIBLE ?
21/10/2019
Seconde main, recyclage, artisanat : loin des cadences infernales de la fast fashion, la mode éthique – ou slow fashion – bouscule les lignes du secteur de l’habillement.
Retour sur ce débat enregistré en public le 14 octobre 2019 à La REcyclerie, à Paris. Avec Eloïse Moigno, co-fondatrice de sloweare.com, Gaëlle Constantini, créatrice de la marque Gaëlle Constantini, et Frédéric Godart, sociologue de la mode et chercheur à l’INSEAD.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Deuxième industrie la plus polluante du monde après l’extraction pétrolière, le textile émet chaque année 1,8 milliard de tonnes de gaz à effet de serre1. Et malgré les 1200 morts du Rana Plaza en 2013 – tragédie censée « éveiller les consciences » – la production et la consommation de vêtements continuent d’augmenter de manière exponentielle (production mondiale estimée à 140 milliards de pièces en 2018, contre 50 milliards de pièces en 20001).
Du remplacement permanent à l’éthique permanente
« Matrice de l’obsolescence programmée, la mode a créé le mouvement du remplacement permanent », analyse Frédéric Godard. Face à cette réalité, comment programmer l’obsolescence de ce système écologiquement intenable, socialement irresponsable ? Comment démocratiser une mode éthique, respectueuse du vivant ?
« Il y a déjà beaucoup de tissus à utiliser, à revaloriser, plutôt que de créer de nouvelles matières et de mettre à contribution la planète ». Tel est le point de départ de Gaëlle Constantini et son projet d’upcycling, ou sur-cyclage. Pour cette créatrice, « la mode, c’était mieux avant ». Quand « chacun avait son propre style » et quand la fast fashion n’imposait pas encore son rythme. Pour Frédéric Godart, la revalorisation est une notion clé. Elle permet à la fois « de faire le lien avec la responsabilité et de répondre au besoin du style, que l’on ne peut pas réprimer ».
La seconde main offre également la possibilité de revitaliser nos armoires avec des pièces rares, bon marché et de qualité. Adepte du minimalisme, Eloïse Moigno voit toutefois dans le vêtement d’occasion « une solution de facilité si l’on ne change pas notre façon de consommer ». Car, in fine, il s’agit d’acheter beaucoup, beaucoup moins. Son conseil ultime, si l’on passe tout de même par l’acte d’achat : miser sur le « prix à l’usage », c’est-à-dire, « inclure le coût social et environnemental dans le prix du produit ».
Note
1 Les chiffres mentionnés sont tirés de l’enquête de Majdouline Sbai, Une mode éthique est-elle possible ? (Rue de l’échiquier, 2018)
Pour aller plus loin
Andrew Morgan, The true cost (documentaire, 2015)
Ademe, Le revers de mon look
Frédéric Godart, Three Ways Luxury Fashion Can Be Sustainable
L’équipe
Programmation : Les Filles sur le Pont.
Animation débat, podcast, rédaction : Simon Beyrand.
Sound design : JFF.
Photo : Friperie Oxfam à Lille. © Oxfam France sur flickr.com
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